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Contrefaçon d'œuvres de l'esprit : mise à disposition d'un logiciel permettant la communication au public d'œuvres protégées

Affaires - Immatériel
13/03/2018
Tout service de communication au public en ligne d'œuvres protégées, sans qu'aient été obtenues les autorisations requises et toute mise à disposition d'un logiciel ayant cette finalité, entrent dans les prévisions de l'article L. 335-2-1 du Code de la propriété intellectuelle.
Ainsi doit être confirmé l'arrêt d'appel qui pour retenir l'infraction prévue et réprimée par ce texte (contrefaçon d'œuvres de l'esprit) énonce que l'accès ouvert au public sur le site litigieux, d'un logiciel est manifestement destiné à la mise à disposition du public des oeuvres et objets protégés sélectionnés par le site et que s'il ne stockait pas le logiciel en question, le site comportait sur sa page d'accueil un sous-dossier donnant accès au public à l'équivalent d'un guide de paramétrage et d'utilisation de ce logiciel, ce dernier étant manifestement destiné au téléchargement non autorisé de films et de logiciels protégés. Tel est l'un des enseignements d'un arrêt rendu le 27 février 2018 par la Chambre criminelle de la Cour de cassation.

Puis, après avoir rappelé les principes d'indemnisation de la contrefaçon encadrés par l'article L. 331-1-3 du Code de la propriété intellectuelle (prise en compte des trois postes de préjudice que sont le manque à gagner, le préjudice moral et les bénéfices réalisés par le contrefacteur ou, sur demande de la victime, l'allocation d'une somme forfaitaire), la Cour de cassation censure l'arrêt d'appel.

En effet, celui-ci, pour écarter le mode d'évaluation de son préjudice matériel proposé par la SACEM, partie civile, retient que les prévenus font valoir que les chiffres retenus par les différentes parties civiles sont, à la fois incertains et contradictoires, qu'il en est ainsi du prix du téléchargement légal, bien différent d'une partie civile à l'autre, de la retenue pour une seule d'entre-elles d'une décote tenant au fait que certains internautes téléchargeant un film illégalement ne l'auraient pas acheté. Les juges ajoutent que, surtout les chiffres de téléchargement affichés sur le site litigieux sont tout sauf certains, et que pour rejeter sa demande au titre d'un préjudice moral, que celle-ci n'est pas justifiée.

Pour la Haute juridiction, en statuant ainsi, la cour d'appel qui, d'une part, ne s'est pas expliquée sur les critères qu'elle devait prendre en considération au titre de l'article L. 331-1-3, alinéa 1er, du Code de la propriété intellectuelle et qui n'était pas saisie par la partie lésée d'une demande d'indemnisation forfaitaire prévue au second alinéa du même article et qui, d'autre part, n'a pas évalué la réparation de l'atteinte aux droits moraux dont bénéficie l'auteur de toute oeuvre de l'esprit du fait de sa contrefaçon, n'a pas justifié sa décision.
 
Par Vincent Téchené
Source : Actualités du droit