Retour aux articles

L’assignation à résidence de l'étranger n’est pas contraire au droit d’asile

Civil - Personnes et famille/patrimoine
11/06/2018
Dans un arrêt du 1er juin 2018, le Conseil d’État affirme que l’article L. 742-2 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne méconnait pas le droit d’asile, et qu’il n’y a donc pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la QPC relative à la conformité de cet article à la Constitution.
Le requérant avait formé un recours pour excès de pouvoir devant le tribunal administratif contre l'arrêté du préfet l'assignant à résidence aux fins de mise en œuvre de la procédure de détermination de l'État responsable de l'examen de sa demande d'asile. À l'apui de ce recours, il demandait que soit renvoyée au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions des articles L. 742-1 et L. 742-2 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA). Le tribunal administratif avait décidé de ne transmettre la question qu'en tant qu'elle mettait en cause le second article. Le requérant soutenait que cet article portait atteinte au droit d'asile garanti par le quatrième alinéa du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, et l'article 53-1 de la Constitution.

Assignation à résidence

Le Conseil rappelle notamment les dispositions de l’article L. 742-2 du CESEDA, qui permettent à l'autorité administrative d'assigner à résidence l'étranger, pour une durée maximale de six mois renouvelable une fois, aux fins de mise en œuvre de la procédure de détermination de l'État responsable de l'examen de sa demande d'asile et celles de l’article 53-1 de la Constitution. Selon cet article, « même si la demande n'entre pas dans leur compétence en vertu de ces accords, les autorités de la République ont toujours le droit de donner asile à tout étranger persécuté en raison de son action en faveur de la liberté ou qui sollicite la protection de la France pour un autre motif ».

Le Conseil précise que, si ces dernières dispositions réservent à l'État le droit souverain d'accorder l'asile à toute personne étrangère alors même que l'examen de sa demande d'asile relèverait de la compétence d'un autre État, elles ne sauraient par elles-mêmes s'opposer à l'application de dispositions mettant en œuvre les accords, conclus avec des États européens, en vertu desquels l'examen de demandes d'asile peut relever de la compétence d'un autre État que la France.

Dispositions conformes à la Constitution

Le Conseil note, également, que les dispositions de l’article L. 742-2 précité prévoient des mesures susceptibles d'être prises par l'autorité administrative aux fins de mise en œuvre de la procédure de détermination de l'État responsable de l'examen d'une demande d'asile, organisée par le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013. Il ajoute que ces dispositions ne s'opposent pas, ainsi que le relève d'ailleurs explicitement le dernier alinéa de l'article L. 742-1, à ce que l'État puisse souverainement décider d'accorder l'asile à une personne étrangère dont l'examen de la demande d'asile relèverait pourtant de la compétence d'un autre État en vertu du règlement.

Il conclut, donc, que ces dispositions ne méconnaissent pas le droit d'asile énoncé au quatrième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 qui, compte tenu des dispositions de l'article 53-1 de la Constitution, n'implique pas que l'étranger qui s'en prévaut bénéficie d'un droit au séjour provisoire sur le territoire qui excéderait le droit au maintien sur le territoire prévu dans le cadre de la procédure de détermination de l'État responsable de l'examen de sa demande d'asile en vertu du règlement. Il en résulte qu’il n’y a pas lieu de renvoyer la QPC au Conseil constitutionnel.

Par Marie Le Guerroué
Source : Actualités du droit