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Validité de l'augmentation du capital d'une banque sans l'accord de l'assemblée générale

Affaires - Banque et finance, Sociétés et groupements
21/11/2016
L'augmentation du capital d'une banque sans l'accord de l'assemblée générale de celle-ci est valable dans une situation de perturbation grave de l'économie et du système financier d'un État membre.
L'article 8 § 1, ainsi que les articles 25 et 29 de la directive n° 77/91, du 13 décembre 1976, tendant à coordonner pour les rendre équivalentes les garanties qui sont exigées dans les États membres des sociétés, en vue de la protection des intérêts tant des associés que des tiers, en ce qui concerne la constitution de la société anonyme ainsi que le maintien et les modifications de son capital, doivent être interprétés en ce sens qu'ils ne s'opposent pas à une mesure (telle que l'ordonnance d'injonction en cause au principal) adoptée dans une situation de perturbation grave de l'économie et du système financier d'un État membre qui menace la stabilité financière de l'Union et ayant pour effet d'augmenter le capital d'une société anonyme, sans l'accord de l'assemblée générale de celle-ci, en émettant de nouvelles actions pour un montant inférieur à leur valeur nominale et sans droit de souscription préférentiel des actionnaires existants. Telle est la solution énoncée par la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) dans un arrêt du 8 novembre 2016.

Dans le cadre de la crise économique de 2008, l'Irlande a procédé à la recapitalisation des banques nationales, dont notamment ILP, un établissement de crédit exerçant son activité sur le territoire irlandais. Le ministre irlandais des Finances a soumis aux actionnaires d'ILPGH (société détenant la totalité du capital social d'ILP) une proposition visant à faciliter la recapitalisation d'ILP. Cette proposition a été rejetée par l'assemblée générale d'ILPGH le 20 juillet 2011. Afin de recapitaliser ILP malgré ce refus, le ministre a obtenu en justice une ordonnance d'injonction imposant à ILPGH d'émettre, en échange d'un apport de 2,7 milliards d'euros, de nouvelles actions en faveur du ministre. Celui-ci a donc obtenu, sans décision de l'assemblée générale des actionnaires d'ILPGH, 99,2 % des actions de cette société. Des associés et des actionnaires d'ILPGH ont alors demandé l'annulation de l'ordonnance devant la High Court irlandaise. La CJUE estime que les mesures prévues par la directive n° 77/91 garantissent la protection des associés et des tiers contre des actes pris par des organes des sociétés et concernent, ainsi, leur fonctionnement ordinaire. Cependant, elle note que l'ordonnance d'injonction constitue une mesure exceptionnelle qui s'inscrit dans une situation de perturbation grave de l'économie et du système financier d'un État membre et qui vise à remédier à une menace systémique pour la stabilité financière de l'Union. Ainsi, bien qu'il y ait un intérêt général clair à garantir à travers l'Union une protection forte et cohérente des actionnaires et des créanciers, cet intérêt ne peut être considéré comme primant en toutes circonstances sur l'intérêt général consistant à garantir la stabilité du système financier établi par les Traités de l'Union.
Source : Actualités du droit