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Visite des locaux d’habitation par les agents des services du logement : inviolabilité du domicile – 1 ; droit de ne pas s’auto-incriminer – 0

Pénal - Procédure pénale
Civil - Immobilier
05/04/2019
Le pouvoir des agents assermentés ont le pouvoir de pénétrer dans des lieux à usage d’habitation en l’absence et sans l’accord de l’occupant du local, de recevoir toute déclaration et de se faire présenter toute pièce ou document établissant les conditions d’occupation des locaux. Sur QPC, le Conseil constitutionnel censure partiellement ces dispositions.
En janvier 2019, la 3e chambre civile de la Cour de cassation avait décidé de renvoyer au Conseil constitutionnel, une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) relative à la conformité des dispositions du Code de la construction et de l’habitation (CCH, art. L. 651-4, L. 651-6 et L. 651-7) conférant aux agents assermentés du service municipal du logement, le pouvoir de visiter les locaux à usage d’habitation situés dans le territoire et relevant du service municipal du logement (Cass. 3e civ., 17 janv. 2019, n° 18-40.040, P+B+I ; voir not. Visite des locaux d’habitation par les agents du service municipal du logement : renvoi d’une QPC, Actualités du droit, 28 janv. 2019).
 
Les requérants reprochaient d’abord à ces dispositions de rendre possible l'exercice du droit de visite d'un logement par les agents assermentés du service municipal du logement, sans l'accord de l'occupant ou du gardien du local.
À défaut d’autorisation judiciaire préalable pour surmonter ce défaut d'accord, il en résulterait une méconnaissance de la liberté individuelle et du principe d'inviolabilité du domicile.
Le Conseil constitutionnel confirme cette analyse : en prévoyant que les agents du service municipal du logement peuvent procéder à une telle visite, sans l'accord de l'occupant du local ou de son gardien, et sans y avoir été préalablement autorisés par le juge, le législateur a méconnu le principe d'inviolabilité du domicile.
 
Les requérants dénonçaient ensuite le pouvoir de recevoir toute déclaration et de se faire communiquer tout document établissant les conditions d'occupation du local visité.
Ceci, sans obligation d'informer la personne des griefs dont elle fait l'objet, ni de son droit d'être assisté d'un avocat ou de garder le silence. Il en résulterait une méconnaissance des droits de la défense, du droit à une procédure juste et équitable garantissant l'équilibre des droits des parties et du droit de ne pas s'auto-incriminer.
Mais pour le Conseil constitutionnel, il s’avère d’une part que le droit reconnu aux agents assermentés de recevoir toute déclaration et pièce ou document établissant les conditions dans lesquelles les lieux sont occupés ne saurait, en lui-même, méconnaître les droits de la défense, ni le droit à un procès équitable.
D’autre part, le principe selon lequel nul n'est tenu de s'accuser ne fait pas obstacle à ce que l'administration recueille les déclarations faites par une personne en l'absence de toute contrainte. Ot le droit reconnu aux agents assermentés de se faire présenter des documents tend, non à l'obtention d'un aveu, mais seulement à la présentation d'éléments nécessaires à la conduite d'une procédure de contrôle du respect de l'autorisation d'affectation d'usage du bien. Dès lors, le grief tiré de la méconnaissance de l'article 9 de la Déclaration de 1789 doit être écarté.

Seul le sixième alinéa de l'article L. 651-6 du Code de la construction et de l'habitation est donc déclaré contraire à la Constitution. Aucun motif ne justifiant de reporter la prise d'effet de la déclaration d'inconstitutionnalité, celle-ci interviendra à compter de la date de la publication de la présente décision. Elle sera applicable à toutes les affaires non jugées définitivement à cette date.
Source : Actualités du droit